'It is always with the best intentions that the worst work is done'
On a déjà traité de The Soul of Man under Socialisme, mais non pas directement au sujet de l'individualisme.
Bien évidemment il y a l'ironie paradoxale si célèbre d'Oscar Wilde qui émane aussi de cet essai, mais la conjecture avancée par l'écrivain que l'individualisme pourrait éventuellement (voire inévitablement) être le produit du socialisme, semble être plutôt de la rêverie utopique que de l'ironie de sa part, même si par l'ordre irrévocable des choses, c'est invariablement (et ironiquement) vrai.
N'oublions pas que Wilde vivait pendant la tyrannie de la Révolution Industrielle, bien avant que les syndicats n'aient eu un poids véritable. Le climat social, l'énorme division des classes, et le quasi esclavage y compris l'exploitation des enfants de cette époque, sont très bien décrits par les écrivains comme Charles Dickens (1812-1870) et Victor Hugo (1802-1885).
Oscar Wilde aurait donc été tenté de croire alors dans ce nouveau socialisme voire communisme, bien qu'on ait l'impression qu'il n'était pas entièrement convaincu, qu'il était assez visionnaire, que déjà alors il y voyait les nuages des illusions, de la tromperie et des contradictions qui se formaient à l'horizon lointain.
Ceci est évident par ses opinions et ses observations qui vont carrément à l'encontre de l'idéologie que même aujourd'hui on se borne à perpétuer. Mais ce serait tout à fait normal que Wilde soit tenté alors à y croire, comme il était aussi sans doute convaincu que la Révolution Française fut parfaitement justifiée, sans trop vouloir entrer dans les détails. Cette conviction est déjà assez manifeste dans cette phrase de son essai : 'To the thinker, the most tragic fact in the whole of the French Revolution is not that Marie Antoinette was killed for being a queen, but that the starved peasant of the Vendée voluntarily went out to die for the hideous cause of feudalism.'
L'ironie, bien évidemment c'est qu'une idéologie qui prône l'égalitarisme si cher aux 'prolétariats révolutionnaires' ne peut jamais encourager donc déterminer l'individualisme. L'individualisme est incompatible avec l'idéologie pure et dure socialo-communiste. Lorsqu'il s'avère plus évident que jamais, même pour les intransigeants, que le socialisme ne peut que conduire à une sorte de médiocrité régressive, triste, conforme et contre-nature, c'est inéluctable qu'il y aura une renaissance d'appréciation pour l'individuel. Celui ou celle qui historiquement inspire toujours la confiance. L'exemple digne de ses aspirations, sa capacité voire son génie, son intégrité et sa volonté. L'expression même d'humanité à son plus haut niveau. Et évidemment ceci, cette qualité humaine, n'a rien, et n'aura jamais rien à voir avec aucune forme de politique ou d'idéologie quelle qu'elles soient.
D'ailleurs la plus grande partie de cet essai exalte l'individualisme et condamne le conformisme, (et même l'altruisme, considéré par l'écrivain indigne).
Alors que les socialistes français veulent se donner l'air d'être de grands et nobles rectificateurs des maux de l'histoire, comme celui de l'esclavage, par exemple, les faits historiques semblent aussi leur rirent au nez. Comme Wilde lui-même faisait aussi remarquer dans cet essai :
'(...) Slavery was put down in America, not in consequence of any action on the part of the slaves, or even any express desire on their part that they should be free. It was put down entirely through the grossly illegal conduct of certain agitators in Boston and elsewhere, who were not slaves themselves, nor owners of slaves, nor had anything to do with the question really. It was, undoubtedly, the Abolitionists who set the torch alight, who began the whole thing. And it is curious to note that from the slaves themselves they received, not merely very little assistance, but hardly any sympathy even; and when at the close of the war the slaves found themselves free, found themselves indeed so absolutely free that they were free to starve, many of them bitterly regretted the new state of things.(...)'
L'hypocrisie c'est que de tels esprits tartuffes continuent sans aucun complexe de culpabilité, de conscience ou de scrupules à faire des affaires avec ceux qui perpétuent l'esclavage même aujourd'hui. Un esclavage caché et insidieux qui pourrait être considéré même pire dans certains égards que celui pratiqué ouvertement aux Etats Unis avant la guerre civile de 1861-65.
(Il est aussi à noter que dans leur élan de rectifier de tels maux du passé, comme celui perpétré même par les autorités françaises- l'événement du 19 octobre, 1961, ils semblent oublier de manière grossière les maux bien plus importants perpétrés par ceux devant lesquels ils se mettent à genou si humblement et honteusement aujourd'hui.
Malgré le cessez-le-feu avec l'Algérie le 19 mars, 1962, à 12h, suivant la signature des accords d'Evian la veille, et après huit ans de guerre, quasi 100,000 harkis et membres de leurs familles furent massacrés, et plusieurs centaines de soldats français furent tués ou blessés par la suite. En outre l'historien Jean-Jacques Jordi affirme que 1253 européens ont disparu entre le 19 mars et le 31 décembre, 1962. L'Algérie n'a jamais reconnu de telles exactions commises par le FLN.
Personne cependant de l'illustre gouvernement socialiste français n'en demande aucun compte-rendu ni aucune apologie de la part des autorités ou des concernés algériens).
Mais pour retourner à l'essai de Wilde. Il a aussi fait cette observation en ce qui concerne la richesse :
'(...) There is only one class in the community that thinks more about money than the rich, and that is the poor. The poor can think about nothing else. That is the misery of being poor. What Jesus has to say, is that man reaches his perfection, not through what he has, or even through what he does, but entirely through what he is. (...)'
Peut-être la forme de socialisme imaginaire de Wilde faisait partie de son propre rêve utopique, parce que si l'individualisme en est même le produit, ce serait à condition- et revoilà l'ironie- que toutes formes et systèmes de gouvernement soient totalement abandonnés y compris celle de la démocratie...
'(...) He who would be free", says a fine thinker, "must not conform." And authority, by bribing people to conform, produces a very gross kind of over-fed barbarism amongst us. (...)'
En fait Oscar Wilde l'admet lui-même en ajoutant plus loin : '(...) Is this Utopian? A map of the world that does not not include Utopia is not worth even glancing at, for it leaves out the one country at which Humanity is always landing. And when Humanity lands there, it looks out, and seeing a better country, sets sail. Progress is the realisation of Utopias. (...)'
L'individualisme le plus évident est celui qui determine l'art même. '(...) Indeed, the moment that an artist takes notice of what other people want, and tries to supply the demand, he ceases to be an artist. (...) He has no further claim to be considered as an artist. Art is the most intense mood of Individualism that the world has known. (...)'
Selon Wilde donc, s'il y a de très bonne poésie anglaise, c'est parce que le public ne la lit pas.. Par conséquence elle n'est pas sujet et ne souffre pas de l'influence publique.
La communauté, corrompue par l'autorité, est donc incapable d'apprécier ou de comprendre l'Individualisme. '(...) In a word, it comes from that monstrous and ignorant thing that is called Public Opinion, which, bad and well-meaning as it is when it tries to control action, is infamous and of evil meaning when it tries to control Thought or Art. (...)'
Dans cet essai il fait aussi allusion à la Renaissance : '(...) One might point out how the Renaissance was great, because it sought to solve no social problem, and busied itself not about such things, but suffered the individual to develop freely, beautifully, and naturally, and so had great and individual artists, and great and individual men. (...)'
Puis à propos d'égoïsme, très applicable bien entendu à nos jours : '(...) Selfishness is not living as one wishes to live, it is asking others to live as one wishes to live. And unselfishness is letting other people's lives alone, not interfering with them. Selfishness always aims at creating around it an absolute uniformity of type. Unselfishness recognises infinite variety of type as a delightful thing, accepts it, acquiesces in it, enjoys it. It is not selfish to think for oneself. A man who does not think for himself does not think at all. (...)'
Considérons encore la période industrielle du 19° dans laquelle Oscar Wilde vivait. Considérons aussi la situation géopolitique de son époque. Puis comparons ses opinions et ses convictions avec celles de certains idéologues d'aujourd'hui, comme celles par exemple dont j'ai déjà fait référence. Puis considérons le sens des mots comme égalitarisme, individualisme, régression et évolution.
Oscar Wilde, Prince de l'Individualisme, est un exemple brillant d'une victime des conformistes, des hypocrites, des bigots et des ignorants qui malheureusement font toujours partie inhérente du monde.
Mais on continue toujours à apprécier l'œuvre de Wilde, son art, sa sagesse et son grand esprit, tandis que ses pauvres persécuteurs sont tous tombés lamentablement (abysmally) dans les bas fonds des oubliettes.
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Oscar Wilde. The Artist
Text © Mirino (PW). Portrait of Oscar Wilde by Toulouse Lautrec. Extracts from Collins' Complete Works of Oscar Wilde, with thanks. October, 2012
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