'I hate vulgarity in literature. The man who could call a spade a spade should be compelled to use one. It is the only thing he is fit for'
Ceci n'est pas une référence à l'œuvre écrite d'Oscar Wilde.
Au contraire, selon mes propres convictions, il s'agit d'une dénonciation de tous ceux qui, sans scrupules, se bornent à perpétuer un mythe dédaigneux en attribuant un certain livre à l'écrivain anglo-irlandais purement pour des fins mercenaires.
En lisant, d'abord par curiosité de ma part, ce livre attribué à lui, ceux qui connaissent son œuvre sont- j'en suis persuadé- très rapidement portés à la conclusion que non seulement Oscar Wilde n'a jamais pu l'écrire, mais qu'il aurait insisté catégoriquement, même en suppliant à genoux si nécessaire, de n'en être jamais associé.
Non seulement à cause du thème dépourvu d'amour vrai, ou des scènes répugnantes et laides, sans aucune sensualité ou subtilité, ou l'histoire elle-même, plutôt absurde, grotesque et pathétique, mais bien évidemment à cause de la manière dont il a été écrit. Bien trop mal pour jamais être imputé aux œuvres d'Oscar Wilde.
Nous savons à quel point Wilde fut un esthète raffiné et sensible. Il défendait art for art's sake, puis beauty for beauty's sake. Il vivait en fonction de ses idéaux et ses principes, qu'il défendait toute sa vie, et même dernièrement au prix de sa vie, certainement en ce qui concerne son œuvre écrite.
Dans ce livre dont on fait l'anagramme Nelety, il n'y a qu'un faux semblant superficiel d'esthétisme, probablement dans une tentative maladroite d'imiter le style de Wilde, naturellement, et pour cause, sans jamais réussir.
D'ailleurs il y a des phrases que Oscar Wilde aurait évité comme la peste. Prenons par exemple: P. 202. "L'habit ne fait pas le moine (...) ou en P.51. "Quand on le veut, on le peut", (...) ou "(...) j'en ai bien d'autres chats à fouetter (...)." Il en aurait eu horreur.
Jamais Wilde n'aurait utilisé ou permis d'être associé avec l'utilisation de telles phrases aussi banales, sans au moins se moquer d'elles en ajoutant des tournures paradoxales comme pour la première : il le cache plutôt, ou la seconde : mais quand on le peut on ne le veut plus. Mais ni l'une ni l'autre de ces dernières suggestions ne lui aurait été acceptable non plus.
Puis sur la page 131, il y a une 'note du traducteur' à propos du mot bougre 'en français dans la copie manuscrite'. Selon lui 'ce mot est employé ici avec la signification qu'on lui donnait au XVIIIe siècle' (s'agissant en fait du XIXe siècle, le 'traducteur mystérieux', s'est trompé carrément de siècle) 'et dont les anglais ont tiré le terme argot bu..er (...). Il va sans dire qu'il n'y a aucun rapport, et n'en a jamais eu, entre le mot bougre et le mot anglais (qui n'est pas non plus un mot argot) dont le soi-disant traducteur a fait allusion.
Sur p.192 on formule une phrase '(...) un homme ne doit jamais rencontre son alter ego (...).' Alter ego ne se réfère-t-il pas à un individu qui mène une vie double, plutôt qu'à une soi-disant similarité entre deux personnes?
Sur la page précédante celle du titre du livre en français dont je me réfère (Le Cercle Poche) on peut lire: 'Malgré toutes nos recherches, il nous a été impossible de retrouver l'auteur de la traduction originale. Dans le cas où le traducteur reconnaîtrait son œuvre et serait à même d'en établir la preuve, il est prié de se faire connaître sans délai auprès de la société GECEP (...)'.
(Dans la supposition très improbable que Wilde voulut être engagé personnellement dans un tel projet sans intérêt, il aurait été assez capable de faire la traduction lui-même, ce qui ajoute encore à la certitude que ce livre n'a rien a voir avec Oscar Wilde).
Edison, né en 1847, inventa la lumière électrique en 1880. Si on maintient que ce livre ait été écrit avant 1893- la date de sa première publication, 'la lumière électrique' ainsi qu'une 'forte batterie électrique' dont ce livre fait aussi allusion, sont totalement hors du contexte historique. En page 245 on fait même allusion à 'l'appel strident d'une sonnette électrique'. A l'époque d'Oscar Wilde, ou on utilisait les heurtoirs, ou les cordons ou poignées de clochettes. Même les sonnettes à ressort n'étaient pas trop courantes avant 1914. Inutile d'ajouter que de telles négligences rendent l'attribution du livre à Oscar Wilde encore plus absurde.
Donc on prétend que Nelety, ou disons son autre titre comme The other side of the coin, fut publié d'abord à Londres en 1893 (Sept ans alors avant la mort de Wilde).
Bibliothécaire de livres érotiques, Charles Hirsch, a soutenu qu'il fut écrit par Wilde et/ou son proche entourage. Wilde n'aurait jamais écrit quoi que ce soit en collaboration aussi désinvolte avec qui que ce soit. Comme écrivain il avait justement trop de self-estime et aussi trop de respect pour son œuvre pour se diminuer ainsi, produisant avec des autres un tel résultat aussi pauvre et vulgaire, et évidemment il n'en aurait été jamais intéressé donc incliné d'y participer.
Oscar Wilde le souligne lui même :
Bad artistes always admire each others work. They call it being large-minded and free from prejudice. But a truly great artist cannot conceive of life being shown, or beauty fashioned, under any conditions other than those he has selected.
On dit que le manuscrit s'est trouvé chez Leonard Smithers and Harry Sidney Nichols, éditeurs victoriens qui avaient travaillé en collaboration avec d'autres éditeurs à Londres et à Paris se spécialisant dans la pornographie. Comme Smithers est connu pour avoir piraté le travail de Wilde, il n'aurait guère été étonnant s'il utilisait le nom de Wilde pour vendre cet effort parmi d'autres sous le nom (imprint) de Erotika Biblion Society.
Y-a-t-il quelque chose de pire que la basse médiocrité exploitée de manière aussi honteuse? Une histoire ou prétexte même le plus cru, écrit par quiconque pourrait être aussi fatiguant sinon pire, mais un tel livre serait au moins plus honnête dans sa pauvreté. La médiocrité crue de Nelety est rendue totalement inacceptable par la prétention qu'elle est l'œuvre, ou même partiellement l'œuvre, d'Oscar Wilde, naturellement pour pouvoir continuer à le vendre ad infinitum.
On vend la médiocrité de très mauvais goût dans le nom de Wilde en crachant donc continuellement sur sa tombe. On le diffame en faisant en somme un deuxième procès interminable, comme si le premier n'a pas suffit, et comme si tout ce pour lequel il vivait et tout ce qu'il avait tant défendu pendant son existence, ne représentent strictement rien.
Malgré tout sa souffrance vers la fin de sa vie, on continue quand même à le marquer au chaud de façon ignoble en l'associant avec un tel livre piètre et pathétique qui lui aurait fait horreur. Ce qui est de bas fond immoral c'est justement cette association sciemment perpétuée pour la postérité. Par rapport avec une telle contrefaçon, le livre lui-même n'a pas d'importance.
Pour être juste cependant, il y a des rares passages dans ce livre qui arrivent à un niveau que l'on pourrait juger quasi 'acceptable', mais il n'y aucun passage que l'on puisse associé avec l'écriture d'Oscar Wilde. Quelle que soit la tendance du lecteur intelligent, il ne serait point ému, stimulé ou convaincu par ce livre.
Cette allusion est simplement fait, non pour défendre l'œuvre d'Oscar Wilde qui se défend fort bien toute seule, elle est faite pour condamner tous ceux qui, par ignorance ou intérêt, continuent faussement à attribuer ou à associer à lui un livre sans intérêt ou valeur, plutôt pour des considérations mercenaires. Ainsi ils essayent de perpétuer indéfiniment la vente du livre en dépit d'un des plus grands écrivains et intellectuels anglo-irlandais du 19e siècle, de tout ce qu'il eut défendu et pour lequel il eut vécu.
Il disait lui-même à sa manière provocante et inimitable : 'Il n'y a pas de livre moral ou immoral. Les livres sont bien ou mal écrits. Voilà tout.
Comme ce livre tombe pile (ou face) au base-fond du dernier panier, il n'a strictement rien à voir avec Oscar Wilde.
This text generally supports this opinion, although to my mind the book in question condemns itself. It cancels itself out. To accord it any importance would be to acknowledge its legitimacy. By feigning to be a work of Oscar Wilde, either fully or partly, it totally forfeits its legitimacy.
Text © Mirino. Source- Teleny (Le Cercle Poche). Portrait of Oscar Wilde by Toulouse Lautrec. Photograph of Oscar Wilde (unknown photographer). With grateful thanks. January, 2012
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