Un pas de trop



Recep Tayyip Erdoğan révèle de plus en plus ce qui semble un objectif politique fondamentaliste.
D'ailleurs le chef actuel du gouvernement de la Turquie a été incarcéré en 1999 pour avoir constamment fait des déclarations publiques pendant les manifestations en faveur du 'Welfare Party', un mouvement islamique fondamentaliste. A cette époque ce parti a été déclaré non-constitutionel par la Cour Constitutionnelle de Turquie. On l'a estimé comme une menace contre l'ordre laïque du pays.
M. Erdoğan a été également condamné alors pour avoir récité une poésie en Siirt dont la version originale écrite par Ziya Gökalp, a été 'modifiée' en y comprenant des changements tels que- 'les mosquées sont nos casernes, les dômes nos casques, les minarets nos baïonnettes et les fidèles nos soldats'.

Ironiquement M. Erdoğan, totalement préparé donc à s'engager, à manifester et même à payer les conséquences pour ses convictions il y a 14 ans, est bien moins indulgent et tolérant envers ceux et celles qui essaient de défendre leurs propres convictions aujourd'hui.

Mais Recep Tayyip Erdoğan a toujours donné l'impression de cacher son jeu, et même de jouer un double jeu. Ce qui se passe actuellement semble révéler davantage ses vrais objectifs, rendant les réformes démocratiques qu'il avait faites auparavant comme des gestes d'apaisement pour pouvoir être accepté au sein de la Communauté Européenne.
Les manifestants veulent que M. Erdoğan et son AK parti, estimés aujourd'hui bien trop despotiques, démissionnent.

Les nouvelles restrictions imposées incluent la vente d'alcool. Les négociants de vin, etc., ne peuvent vendre aucune forme de boisson alcoolisée entre 22h et 6h.00. Ils ne peuvent plus exposer quoi que se soit d'alcoolisé dans leurs vitrines. Les restaurants près des écoles et des mosquées n'ont plus le droit de vendre d'alcool. (Tout ceci malgré le fait que le peuple turc consomme moins d'alcool que n'importe quel peuple des pays européens).

Aujourd'hui l'enseignement islamique et Coranique est plus largement répandu et appliqué. Les robes des femmes les couvrent davantage. Le rouge à lèves devient interdit, y compris pour les hôtesses de l'air. On n'a plus le droit de s'embrasser en public.

C'est certain que de telles décisions vont avoir un effet négatif sur le tourisme en Turquie.

La goutte qui a fait déborder le vase a été le plan d'aménagement urbain du parc Gezi. C'est ce projet qui a incité les manifestations massives de milliers de personnes à la place Taksim et dans ses environs. Ces manifestations ont été brutalement réprimées par les forces de l'ordre. Canons à eau, des gaz lacrymogènes ont été déployés contre tout le monde y compris ceux qui tenaient à protéger les 600 arbres qui vont être abattus. Beaucoup de manifestants ont été blessés, parfois très sérieusement. Certains ont été laissés inconscients bien longtemps avant de pouvoir être secourus.
Le projet imposé, dénoncé par plusieurs urbanistes, écologistes et architectes, est la substitution du parc Gezi par un centre culturel, un centre commercial et une reconstruction d'une caserne militaire de l'époque ottomane.
Un autre projet contesté est la démolition du Centre Culturel Atatürk, qui se trouve aussi à la place Taksim, ceci pour le remplacer par un théâtre de l'opéra.

Depuis les répressions brutales, M. Erdoğan a été renommé 'Tayyip le chimique'. Mais sa réponse ne reflet aucunement le respect pour le peuple turc : 'Faites ce que vous voulez, nous avons décidé'...

On avait déjà eu un indice des tendances de M. Erdoğan. Sa manière provocante, par exemple, d'ignorer le droit international d'Israël de maintenir un blocus maritime pour raisons de sécurité. On a aussi noté sa continuation de traiter les Kurdes comme des terroristes, au lieu de faire davantage pour leur permettre de préserver leur culture et identité, qui est essentiellement tout ce qu'ils demandent et défendent.

M. Erdoğan préparerait-il le terrain pour 'l'après Assad'? Ce virement vers le fondamentalisme islamique serait-il pris non seulement par conviction personnelle mais aussi par appréhension à l'égard des rapports avec des voisins à l'avenir?
S'agirait-il déjà d'un pas de trop?  

Quoi qu'il en soit, on dirait qu'une période très critique et révélatrice soit en train de se dérouler en Turquie. Et ce qui est en tous cas évident c'est que M. Recep Tayyip Erdoğan est loin d'être un Mustafa Kemal Atatürk.
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Comme un après note, ce n'est pas hors de propos de comparer le comportement de M. Erdoğan avec les practiquantes des autres idéologies, ceux qui veulent imposer des lois sociales, par exemple, qui, elles aussi regardent d'abord le peuple.
Il n'y a aucun doute que ceux qui prétendent avoir de tels droits sur un peuple, de décider pour eux, de dicter et d'imposer des lois sans égard au principe de la démocratie, et au nom d'une religion ou d'une idéologie (qui essentiellement est la même chose) sont sur le chemin vers le totalitarisme, et donc de la tyrannie.  

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Text and image © Mirino Sources include Wikipedia, with thanks. June, 2013

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