En France on ne parle pas trop de Napoléon. Le nom même n'est pas parmi ceux acceptés comme politiquement correct. Ce n'est pas à cause du fait qu'il a finalement perdu la Bataille de Waterloo, bien qu'évidemment cela soit aussi un facteur déterminant. Car dans l'histoire ce sont toujours les conquérants qui ont forcément raison. L'histoire d'ailleurs n'est écrite que par ces derniers.
Mais de continuer à bouder Napoléon semble être aussi dépassé que mesquin.
Ironiquement, si actuellement on veut savoir davantage à propos de Napoléon, il faut se renseigner auprès des sources plutôt anglaises. Néanmoins il y a des exceptions qui excellent, ceux qui écrivent la vérité, comme Thierry Lentz, historien et directeur de la fondation Napoléon, un spécialiste de renommée internationale à l'égard du 'petit corporal'.
Napoléon est un cas particulier, unique dans l'histoire, et donc fascinant.
Quand j'étais très jeune, bien trop jeune pour connaître les subtilités de l'histoire, et encore moins celles de l'histoire de la France, j'avais une vieille gravure d'un portrait de Napoléon. Peut-être l'ai-je toujours, quelque part. Mais il y avait quelque chose qui émanait de ce portrait que j'admirais. En quelque sorte, sans savoir pourquoi, cette gravure de Napoléon m'inspirait, même déjà à ce tout jeune âge.
Peut-être alors j'ai compris instinctivement qu'il a été un homme seul avec un sacré destin. Plus tard j'ai appris davantage à propos de lui. Par exemple à quel point il était adoré par ses hommes. On ne peut pas dire la même chose pour les cas comme Hitler. D'ailleurs comparer les deux hommes n'est pas possible, ni en tous cas sensé. L'un a été un fou mégalomane qui n'a laissé derrière lui qu'une désolation ruineuse et atroce, surtout en ce qui concerne l'humanité, tandis que l'autre a été un visionnaire qui a certes commit des fautes, mais qui en fin de compte a réussi à établir davantage de choses positives et constructives que le contraire.
Napoléon n'a jamais été un dictateur tyrannique. Il ne régnait pas avec le soutien constant des homme d'armes, et il écoutait souvent les opinions des autres pour mesurer les pour et les contre avant de finalement prendre une décision.
En ce qui concerne la religion, il a rédigé les décrets pour ré-assimiler les religions diverses y comprises la religion hébraïque, mais faisant en sorte que les hébreux s'engageassent davantage à la vie commune française en pratiquant les professions dites 'utiles', plutôt que de se limiter uniquement aux affaires financières.
Napoléon était vénéré par ses troupes. Après la retraite de Moscou la plupart des 50,000 soldats qui restait de la Grande Armée fut sauvé par les pontonniers dont la majorité donna leur vie en travaillant dans l'eau glaciale de la Bérézina. Ils construisirent deux ponts, dont un long de 100 mètres et large de 4 mètres. Le deuxième pont plus court mais plus costaud était destiné pour faire passer les chariots de marchandises.
Le 28 novembre, 1812 les russes attaquent. Leurs obus font beaucoup de dégâts.
Les pontonniers sous les ordres du général Eblé sont finalement contraints de détruire les ponts le 29 novembre. Douze mille retardataires seront capturés par les russes.
L'histoire pourrait bien décrire cet événement comme une défaite catastrophique. Mais il en est autrement. Globalement le calcul russe de Napoléon a été mauvais certes, mais sa retraite pourrait être considéré comme une victoire, car grâce à l'héroïsme des pontonniers et l'action du Général Eblé, Napoléon et la majorité de sa grande Armée furent sauvés. Les pontonniers néerlandais sous les ordres du général travaillaient dans l'eau glacée les 26, 27 et 28 novembre à Stoudienka, pendant que Napoléon manœuvrât pour faire une diversion contre l'armée russe. C'est quand même un accomplissement extraordinaire qui témoigne d'une solidarité et d'une fidélité absolue.
Jamais donc on pourrait traiter ce sacrifice dévoué pour sauver Napoléon et la majeure partie de sa Grande Armée comme une défaite cuisante. Au contraire, c'était l'équivalent d'un Dunkerque du 19° où personne n'a quitté sa poste ou a négligé son devoir. Personne n'est décidé à se rendre à cause des difficultés extrêmes. D'ailleurs on sait depuis que l'ennemi le plus redoutable pendant cette campagne mal avisée a été le froid et la maladie. Mais malgré cet ennemi terriblement cruel, jamais on n'a laissé tomber le petit corporal.
Sans Napoléon après la Révolution Française, le pays serait resté irrémédiablement divisé. Un bateau désespérément abîmé, voguant, souillé de sang et quasi sans gouvernail. Car malgré les die-hard glorificateurs, incluant ceux convaincus que cette ignoble Révolution n'est même pas encore terminée, comme si le règne de terreur n'avait pas assez duré, les fondations les plus solides de la République eussent été établies grâce aux visionnaires capable de souder le peuple et de voir bien plus loin. Napoléon a permit à la France de se réconcilier, toutes classes comprises.
Sans Napoléon, les nations de l'Europe continentale auraient prises beaucoup plus de temps à se former et à s'établir. Avant les guerres napoléoniennes, les pays comme l'Allemagne et l'Italie parmi d'autres, se constituaient de baronnies féodales, ou de petites républiques indépendantes comme a été Venise, par exemple. Un patchwork désuni. L'esprit national des pays de l'Europe continentale est aussi né à cause de Napoléon, même si ça ne fut jamais un objectif conscient de sa part.
On pourrait aussi avancer que Napoléon fût un des premiers leaders européens. Sa grande armée ne se constituait pas uniquement des français. Songez pour un moment que même les pontonniers néerlandais se sont sacrifiés pour le sauver, lui et son armée.
Et après le Traité de Fontainebleau, lors de son exil à Portoferraio, sur l'Ile d'Elba, il a aussi fait beaucoup pour y améliorer l'administration et l'infrastructure. Là il a fait en sorte qu'il y ait une meilleure disponibilité d'eau potable pour l'île, et que les hôpitaux soient construits, etc. Personne n'a donc pu imaginer alors qu'il eût l'intention de fuir pour regagner la France.
En fait, même sur l'île il recevait régulièrement des milliers de lettres de partout en Europe. Et non seulement il avait de quoi lire de ses admirateurs, il lisait régulièrement les meilleurs journaux de l'époque, pour s'informer toujours de ce qui se passait dans le monde.
Même sur cette petite île d'Elba, malgré son exil, au lieu de pleurnicher sur son sort, Napoléon s'est engagé à y rendre mieux la vie. Qui pourrait jamais traiter un tel homme de perdant? Déjà pendant sa vie Napoléon est devenu une légende. C'est seulement les piètres esprits, y compris ceux qui ont bénéficié directement des institutions établies par lui, ceux sans trop d'imagination ou d'envergure qui ne sélectionnent que certains chapitres de l'histoire selon leurs besoins idéologiques. Ils ne font jamais allusion à lui, comme s'il n'avait jamais existé.
En février, 1815 il a réussi donc à s'échapper de l'île d'Elba pour retourner en France. La réaction des français était immédiate, surtout celle de ses nombreuses troupes fidèles. Même la police envoyée pour l'arrêter, a finalement plié devant lui. Il est retourné le 20 mars à Paris où s'est déroulée pour l'occasion des célébrations spontanées, tandis que Louis XVIII, se sauvait en Belgique à toute vitesse. Et la période connue sous le nom de l'Histoire des Cent Jours alors commençait.
Napoléon eut le soutien inconditionnel du peuple français, car ces derniers redoutaient le retour d'un vestige de féodalisme sous le règne du nouveau roi Louis XVIII.
Selon eux Napoléon était né de la Révolution, et il défendait les principes les plus valables. En plus Napoléon s'engagea à constituer un gouvernement constitutionnel. Ainsi l'Empereur a pu regagner la France et sa confiance, sans l'emploi d'aucune force et sans qu'une goutte de sang ne soit donc versée.
Mais un seul homme avec un tel pouvoir, une légende vivante, un tacticien génial et un organisateur sans pair, un tel individu, même s'il est admiré ailleurs, est aussi redouté ailleurs. Les puissances internationales de l'époque, y compris les anglais, ne pouvant pas tolérer l'idée de son retour, s'étaient donc engagés à en finir, ce qui a abouti justement à Waterloo.
Parmi ses accomplissements, Napoléon a trouvé les moyens d'accumuler les fonds nécessaires pour financer les institutions nationales, les gouvernements locaux, un système judiciaire, des organes des finances, opérations bancaires, des codes, des traditions de main-d'oeuvre bien-disciplinée et consciencieuse. Il a créé la Légion d'Honneur, un ordre destiné originalement à récompenser les grands élites, les entrepreneurs qui le méritaient. Il a re-fondé complètement le système légal français, établi le Code Napoléon, organisé un projet grandiose pour la construction routière.
Pour l'éducation nationale, Napoléon croyait à un système fondé sur le mérite (plutôt individuel qu'égalitaire) établi sur une échelle large. Il a permit que certaines écoles religieuses soient ré-établies y compris pour l'éducation des filles. Si jamais on a critiqué Napoléon pour avoir pensé qu'il devrait y avoir une différence appropriée entre l'éducation des garçons et des filles, il faut se référer aux moeurs de l'époque. Par rapport à cela Napoléon était déjà très en avance pour son temps.
Avant la Révolution Française- aussi barbare, indigne et hypocrite qu'elle fût- la France vivait quasi dans le féodalisme du 17° siècle. Si elle a pu se rattraper à grands pas, c'était surtout grâce a Napoléon. Grâce à lui ce chapitre indigne, maculé de sang criminel, plein de paradoxes et d'incohérences éphémères des fanatiques illuminés, assez vaniteux de se persuader qu'ils puissent réécrire l'histoire, eut été enfin clos.
Sous Napoléon la France prospérait et jouissait d'avantage de confort en général. L'Empereur a été l'un des plus grands administrateurs de son temps. En somme c'était une belle époque.
Son influence et ses réussites militaires étaient telles que l'enseignement militaire se limitait à l'enseignement napoléonien même jusqu'à la première Guerre Mondiale! C'est ainsi que la France, très mal préparée dans tous les égards, est entrée dans cette guerre terriblement meurtrière.
C'est certain que si un chef de guerre comme Napoléon vivait en 1914, il aurait été bien mieux informé, avisé et donc bien plus capable de préparer la France de façon sérieuse et efficace pour qu'elle puisse mieux se défendre contre les soldats dotés d'armes modernes, sans être obligée de faire de telles manœuvres incroyablement stupides, périmées et naïves, qui provoquèrent forcément des pertes répétitives énormes, tragiques, et totalement inutiles.
Après sa défaite à Waterloo, dont même les éléments- un important orage imprévu- ainsi que son état de santé semblaient vouloir le contrer, curieusement Napoléon se confiait finalement aux Anglais. Il borda le fameux Bellérophon le 25 juillet 1815 pour arriver éventuellement au port de Plymouth où toujours abord, il devait attendre patiemment la décision des autorités britanniques. Auparavant il jouait avec l'idée de chercher refuge politique aux Etats Unis, mais à cause du blocus maritime anglais et le refus de ces derniers de lui accorder un tel privilège, ce ne fut point possible. En tous cas Napoléon n'était pas de ceux qui sont prêts à se cacher indignement dans une cale.
A bord du Bellérophon Napoléon est traité avec respect. D'ailleurs un grand repas est servi dans la salle principale autant à l'égard de Napoléon, ses officiers qui sont alors permis de l'accompagner, ainsi qu'à l'égard des officiers anglais. Lorsque le Bellérophon prendre le large, chaque fois que Napoléon monte sur le pont, surtout initialement pour voir la lente disparition de la côte française, les officiers anglais gardent une certaine distance. Ils ont reçu les ordres de ne pas lui parler sauf si Napoléon leur adressait la parole.
Malgré sa lettre rayonnante de diplomatie adressée au futur roi George IV dont je cite du livre de Thierry Lenz: 'Je viens comme Thémistocle, m'asseoir sur le foyer du peuple britannique; je me mets sous la protection de Votre Altesse Royale, comme celle du plus puissant, du plus constant, du plus généreux de mes ennemis' (13 juillet, 1815), les anglais lui réservent moins d'hospitalité qu'il n'espérait. En effet les autorités eussent décidé autrement.
Napoléon doit donc prendre le Northumberland sans davantage de délais, pour quitter l'Europe. Le 16 Octobre 1815 il débarque à Sainte-Hélène, 1900 kilomètres au large de l'Angola et 3500 kilomètres des côtes du Brésil, presque assez loin d'être oublié, ce qui bien évidemment n'a jamais été le cas.
Bien que son énergie eusse été légendaire, il souffrait de fatigue, maux respiratoires et de dysurie durant la campagne de Russie. Sa santé s'aggravait lors de la Bataille de Waterloo, à tel point qu'il n'arrivait presque plus à monter à cheval. Comme parfois indiqué par la position de son bras gauche, surtout lorsqu'il était monté à cheval, le siège de sa maladie fatale et parfois convulsive, fut justement du côté droit de l'estomac. Mais il est aussi à noter qu'en fonction des uniformes à cette époque, une telle position du bras, que ce soit celui de gauche ou de droite, n'était pas hors du commun, car estimée plus élégante et correcte).
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Text © Mirino. Sources include Napoléon by Thierry Lentz' with many thanks. Top painting: 1814 Campagne de France. Le retour de Soissons après la Battaille de Laon, par Ernest Meissonier circa 1864. Second painting: Wellington à La Battaille de Waterloo. Third painting: Napoléon à board le Belléophon par Sir William Quiller Orchardson (1832-1910) La retenue de Napoléon de gauche à droite: Planat, Montholon, Las Cases, Savary, Lallemand, Bertand. En arrière plan le fils de Las Case. Third image: un des chapeaux de Napoléon.
With thanks to Wikipedia and Wikimedia Commons for any additional information and image sources. August, 2013
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